Des décors du Pavillon Vendôme retrouvés

Le Pavillon Vendôme était en son temps une demeure hébergeant des hôtes prestigieux, mais dont l’histoire détaillée et le quotidien au cours du siècle des Lumières restent mystérieux. Récemment, une vente aux enchères a permis d’en savoir un peu plus, du moins visuellement.

Le Pavillon Vendôme abrite aujourd’hui l’Office de Tourisme de Clichy. Il est difficile d’imaginer son apparence d’antan, car un incendie et d’importantes rénovations sont passés par là. Reste son salon d’honneur et ses dorures, superbement restauré par la Municipalité ; ainsi que l’escalier d’accès aux appartements privés et quelques pierres apparentes au sous-sol (là où se trouvent désormais les sanitaires).

Le mobilier et les décorations d’époque ont disparu. Le Pavillon Vendôme, bien que petit par la taille, n’avait pas à rougir et a même accueilli un personnage aussi important que le Duc d’Orléans (Régent de France, qui a régné durant la minorité de Louis XV) le 23 juillet 1716 : Philippe de Vendôme (propriétaire du Pavillon de 1703 à 1720) y avait donné une fête en son honneur. La soirée fut relatée dans le Mercure de France, écrit de l’époque relatant les activités de la Cour (que j’ai pu consulter aux Archives Nationales) : « Le 23 de ce mois M. le Grand Prieur eût l’honneur de donner à souper dans la maison de Clichy à Monseigneur le Duc d’Orléans. Cette maison qui est toute riante d’elle-même, fut embellie par l’illumination la plus gentille et la plus gracieuse qu’on puisse imagine« . Je précise d’ailleurs que Philippe de Vendôme était ami avec La Fontaine, Voltaire et Rousseau. Peut-être les convia-t-il un jour à Clichy ?

Vestiges du Salon Doré

J’ajoute, et vous verrez où je veux en venir, que le plafond décoré du salon d’honneur du Pavillon a été réalisé par le peintre Claude Audran III (l’un des peintres de la famille royale, qui a notamment travaillé dans la chapelle de Versailles). Peu de ses réalisations sont parvenues jusqu’à nous. Mais, des pièces exceptionnelles ont été vendues aux enchères en mai 2019 par la maison Drouot : des parties du décor d’époque du Pavillon Vendôme ont été retrouvée dans une collection privée et mis en vente. Aucune image de ces panneaux de bois peints n’avaient été diffusées jusque là. Cette mise en vente est une aubaine car elle permet à tout un chacun de les découvrir.

Le catalogue de la vente indique : « Les trois panneaux que nous présentons sont à considérer comme le témoignage précieux d’un ensemble plus important qui devait orner tout un salon doré ou petit cabinet peut-être voulu par Philippe de Vendôme (1712-1727) pour le pavillon de Clichy lors de son réaménagement effectué entre 1699 et 1702 dans le plus pur raffinement emblématique du commencement du XVIIIème siècle. Il faut s’imaginer une pièce entièrement consacrée aux Saisons et l’Art du Jardin comme en témoigne l’iconographie de nos panneaux. Après 1720, Louis Armand de Bourbon, prince de Conti (1695-1727) devint le nouveau propriétaire du pavillon de Clichy et y effectue de nombreux travaux et réaménagements, il nous est permit de penser que c’est à cette époque que les décors d’arabesques par «Audran du Luxembourg» furent remplacés à l’exception du plafond du grand salon d’honneur qui subsiste aujourd’hui. Il semblerait qu’après leur démantèlement, ces trois panneaux se soient très tôt (vers 1720) retrouvés dans la famille d’Harcourt« .

Ils ont changé de propriétaires au fil des ans par héritage, avant d’être mis en vente l’année dernière.

Quelques anecdotes…

Vous me connaissez, j’ai encore quelques petites anecdotes dans ma manche. Au détour de mes lectures, j’ai appris qu’en 1712, Philippe de Vendôme, alors en Italie, apprit la mort de son frère, le Duc de Vendôme. Il partit de Venise en direction de Coire mais, sur la route, se fit enlever par les agents d’un nommé Masner, qui voulait un otage pour négocier la libération de son fils retenu prisonnier en France pour malversation. Philippe de Vendôme sera libéré début juin suite à l’intervention du Compte du Luc, ambassadeur de France en Italie. La nouvelle, et les semaines à attendre sa libération, ont du faire grand bruit à l’époque à Clichy.

Par ailleurs, de tous les propriétaires successifs du Pavillon Vendôme, un seul y est décédé (d’après mes recherches) : Jean-Baptiste de Pille. Il y est mort le 26 mars 1796 à 81 ans, à 9h du matin, d’après l’acte de décès retrouvé aux archives départementales : « décédé à 9h du matin en son domicile rue de Franciade maison lui appartenant », indique cet acte. La rue du Landy a certainement dû être renommée à la Révolution, en effet elle allait en direction de Saint Denis, ville qui a été rebaptisée Franciade à la Révolution.
 
Sa femme, Anne-Félicité de Beaufort, y est peut-être également passée de vie à trépas un an auparavant. Son acte de décès indique qu’elle est décédée le 6 mars 1795 à 2 heures, à l’âge de 64 ans, dans sa maison « située rue de la réunion » à Clichy. Je n’ai cependant par réussi à trouver de trace de cette rue de la réunion, était-ce une ancienne appellation de la rue du Guichet ? Le mystère reste entier.
Jean-Baptiste de Pille exerçait en tous les cas de prestigieuses fonctions : il était conseiller du Roy ; écuyer ; contrôleur du Greffe de la chambre des comptes et Procureur de la chambre des comptes ; il a également été garde du corps de Louis XVI car j’ai découvert son nom sur la liste des gardes du corps du Roi dans les documents qui ont été utilisés lors du procès de Louis XVI. Il était membre de la « compagnie ecossoise des gardes-du-corps du roi ».
Enfin, d’après la « revue illustrée de la noblesse » (édition de janvier 1863 consacrée à l’armorial de la chambre des comptes), ses armoiries étaient « d’hermines au chef de gueules, chargé d’une croix alaisée et dentelée d’argent ».
Crédits photos : Drouot ; Archives départementales

5 réflexions sur “Des décors du Pavillon Vendôme retrouvés

  1. Bonjour,

    Merci pour cet intéressant article sur la pavillon Vendôme. Quelques précisions sur les décors du salon doré : ils ont effectivement été mis en vente à l’hôtel des ventes Drouot le 27 mai 2019, mais par la maison Leclere, qui a été reprise par la maison De Baecque. On peut d’ailleurs voir d’autres photos de ces décors sur le site de ce commissaire priseur :
    https://www.debaecque.fr/lot/95949/10264675?sort=ebd&
    D’après les informations disponibles sur ce site, le décor ne semble pas avoir trouvé acquéreur durant la vente aux enchères, et il a donc dû être repris le précédent propriétaire, un descendant de la famille d’Harcourt.

    Bien à vous.

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    1. Bonjour Adrien
      Merci pur ces précisions très intéressantes, j’espère qu’un jour l’ensemble sera de nouveau en vente et qu’un mécène, ou que la Municipalité clichoise, pourront l’acquérir afin qu’il puisse être présenté au public dans le Pavillon Vendôme. Rêvons un peu 🙂

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  2. Cher Monsieur,

    Je vous remercie pour ce billet. Pouvez-vous cependant y glisser vos sources ? Je précise : les côtes des documents que vous mentionnez avoir consulter aux Archives nationales.

    Bien cordialement,

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